mercredi 2 novembre 2011

Version latine, chants grégoriens et balle aux prisonniers

J’étais encore sur Baudelaire à me demander si Jack Torrance allait se décider à trucider sa femme et son fils lorsque j’entendis ma mère m’appeler.
-François, c’est Julien au téléphone ! Tu le prends dans le salon ?
-Ok ! », hurlai-je de ma chambre. Pas que c’était énorme chez nous, plutôt que les portes étaient épaisses.
-Yo », fis-je finalement pour annoncer ma présence sur les ondes téléphoniques.
-Yo », me répondit Deuf.
-Ca va mec ?
-Ouais ça va. Ecoute, j’ai réfléchi pour cette histoire de groupe.
-Ah ouais ? Cool. Et t’as décidé quoi ? », demandai-je tout en sachant pertinemment ce qu’il en était. Je me sentais un peu comme un mélange de Machiavel et de Richelieu dans les trois mousquetaires.
-Bah, je me suis dit que si je me débrouillais bien, je pouvais peut-être réussir à me libérer le samedi matin. Ca serait bien le samedi matin non ?
-Parfait, carrément parfait.
-Bon bah on commence quand alors ?
-Bah faut que je voie avec Rodolphe mais samedi prochain, ça serait cool.
-Ah merde. J’ai foot samedi prochain.
Je ne répondis rien, laissant le silence exprimer ma désapprobation à ma place. Tant et si bien que, mal à l’aise, Julien en vint de lui-même à proposer une solution.
-Enfin ptêt que je pourrais dire que je me suis foulé un truc ou un autre.
-Voilà. Ca serait pas mal ça.
J’avais semé la graine du doute dans l’esprit de mon ami et ce dernier commençait à douter du charme des matchs le dimanche matin dans des stades vides aux quatre coins du 92. J’étais persuadé qu’il arrêterait bientôt toute pratique sportive et qu’il me remercierait trente kilos plus tard.
Nous avions le groupe, nous avions un squelette de chanson. Restait à trouver notre nom.
-Les imbattables ! » proposa Julien. Nous étions tous les trois réunis au café de la Mairie à Sèvres.
-Putain merde, Deuf », lui dit Rodolphe « On est pas en CM2 en train de trouver le nom de notre équipe de balle aux prisonniers là !
-Ca va c’était pour déconner !
-Ca pourrait être une expression que tout le monde comprend genre… chais pas… « carpe diem » ?
-« Carpe Diem » ? », demandai-je, incrédule.
-Bah ouais genre « profite du jour présent » quoi ! Le cercle des poètes disparus et tout…
-Excuse moi de te corriger mais ta traduction est impropre: « cueille le jour » serait plus correct. » Nous regardâmes Julien avec stupéfaction. Ce mec était fan de l’OM et latiniste ?
-Nan », repris-je après avoir digéré le flot d’information qui venait de m’assaillir. « Pas carpe Diem ». On dirait le nom d’un groupe de curé qui chante des chants…
-Grégoriens », compléta Julien qui voyait que je luttais un peu. Là encore, nous nous retournâmes vers lui.
-Questions pour un champion » fit-il, en guise d’explication.
Une fois chez moi, je me creusais la tête pour tenter de trouver un nom potable, mais rien, le néant, le vide, le grand rien…Mes parents n’étaient pas à la maison ce soir-là et on se mit en position matage de film avec mon frère et un de ses potes.

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