Deux semaines plus tard on se retrouva donc chez Jean-Paul en banlieue est de Paris. Pour arriver chez lui, on avait dû se taper un bon bout du RER A jusqu’à la riante station du Parc de Saint-Maur avant de se cailler une demi heure sous un abribus qui abritait que dalle. Finalement on est monté dans le « Saint-Maur Bus » et là j’ai eu l’impression de tomber dans un vortex me ramenant tout droit quinze ans en arrière lorsqu’on prenait le car pour aller à la piscine en primaire et qu’on se battait, sans vraiment savoir pourquoi, pour avoir la place derrière le chauffeur. Il faisait moche. Je regardais les gouttes faire la course sur la vitre jusqu’à ce que Rodolphe me secoue.
-On y est.
On y était, ok. Mais restait à savoir où. Le nom de la station de bus était le bon, « square beaurepaire » un truc comme ça, ce qui témoignait de la nature assez particulière de l’humour des mecs de la voirie. Comment faire plus glauque que tous ces pavillons semblables alignés les uns à côté des autres, couleur rosée traversés de trace brunes. « La pluie », fit Adrien comme s’il avait bossé dans le bâtiment une bonne partie de sa vie.
-Bon. C’est quoi l’adresse ?
-Rue des Muguets, numéro 12 » fit Baptiste.
-Ok. T’as un plan ?
-Nan. Je voulais l’imprimer ce matin mais j’étais grave à la bourre, du coup j’ai pas pu.
-Ah », fis-je, déçu tel Hannibal de l’Agence tous risques à qui on aurait annoncé que le plan n’allait pas se dérouler sans accroc.
-Par contre, je suis con, on peut toujours appeler Jean-Paul pour qu’il nous indique le chemin. J’ai son numéro.
-Ah bah ouais, carrément.
Baptiste s’exécuta, sortant un portable surdimensionné qui aurait fait pâlir de jalousie Michael Douglas dans Wall-Street. « Me suis fait chourré le mien à Couronnes » nous expliqua-t-il pendant qu’il composait le numéro. La tonalité puis, au bout d’un moment, on entendit tous le message du répondeur de Jean-Paul vu que le téléphone de Baptiste n’était pas super bien réglé. « Salut c’est JP, je suis pas là – sûrement on the road again ! – mais laissez un message après le bip et je vous rappelle illico presto » puis la voix de Lavilliers prenait le dessus « On the road again, again ».. Putain ça faisait beaucoup : « JP », « illico presto » et le surplus de Lavilliers. La tête me tournait. Ce mec était visiblement un grand malade. Baptiste laissa un message lui demandant de le rappeler et en attendant on s’aventura un peu dans les rues pour voir si par hasard. Elles portaient toutes des noms de fleurs, ce qui était plutôt marrant vu qu’on aurait difficilement pu accorder à la commune le statut de ville fleurie. On était dans l’allée des Jacinthes quand on entendit le générique de K2000 résonner. Le portable de Baptiste.
« C’est la sonnerie par défaut, » se justifia-t-il comme si nous l’avions accusé de rendre un culte secret à David Hasselhoff.
-Jean-Paul ? Baptiste à l’appareil. Bien. Ouais bien. On est toujours sur le chemin ouais. Quoi ? « On the road again » ouais ahaha. Dis, on est descendu où tu m’as dit, « beaurepaire » ouais. Comment on fait après ?
JP lui donna les indications illico presto : prendre l’avenue des magnolias sur 100 mètres, puis tourner à la Sente des iris. La rue des muguets était la première sur la gauche.
Au numéro 12, la maison ressemblait étrangement à celle du 10 et du 14 qui semblaient elles-mêmes refléter celles du 13 et du 11. Seule petite nuance différenciatrice, le paillasson en forme de clé de sol témoignait de la présence d’un tempérament artistique dans les environs. La sonnerie fit dring, les pas de Jean-paul dans la maison poum poum, puis la clé qu’il tourna dans la serrure clic.
-Salut les amis ! Vous avez pas eu trop de mal à trouver ?
Ahaha... tu sais que tes titres font de plus en plus peur ?
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